Bonjour à tous,
Voici enfin l’été comme on
l’attendais, avec de la vrai chaleur, de
la vraie sueur, du bleu dans le ciel et des étoiles la nuit, qu’on voit et
qu’on peut rester regarder sans avoir trop froid. Ouf !
Hier soir, moi qui ne sort pas
beaucoup, je suis allée au Cirque, suite à l’invitation très insistante d’un
collègue de boulot. C’est un cirque rural, le « chapiteau du bout du
monde », en effet perdu au milieu des champs et des bois. C’était
chouette, sauf, toujours, les numéros de dressage de chevaux, qui me mettent
vraiment très mal à l’aise (anthropomorphisme ?).
En ce moment je reçoit, au
boulot, des enfants sur une semaine : ils viennent tous les après midis
pour un cycle d’animations, comme toujours sur les plantes et ce qui vit
autour. C’est la première fois que je peux faire comme ça des animations qui se
suivent, et c’est vraiment très agréable. En général les enfants viennent une
fois, ou deux, avec leur école, le centre de loisir, ou autre, et je ne les
revois pas forcément. Cette fois-ci non seulement c’est intéressant d’un point
de vue pédagogique, mais aussi sur le plan relationnel. En plus ce groupe ils
sont assez zen, vivants, mais pas survoltés. En fait je crois qu’ils sont
vraiment détendus, et je me dit aussi que c’est la première fois que je fais
une anim’ avec des enfants qui sont en grandes vacances. C’est vraiment
agréable.
Cet aprèm’, dernier jour, nous
allons faire notre goûter : des pétales de fleurs cristallisées, du sirop
d’herbes aromatiques (j’ai testé lavande-romarin ce matin, délicieux !),
et des chapatis aux plantes sauvages (vraisemblablement de la bourrache, du
chénopode, peut-être des orties, peut-être du thym (pas du sauvage : on
n’est pas en Ardèche !)). Espérons qu’ils aient la papille aventurière !
Une autre animation sympa que
j’ai fait, c’était samedi dernier. Un partenariat avec la ludothèque municipale
et un festival de musiques insolites (« Les Oreilles en
Eventail » !). On a fait une expo d’instrument de musique
traditionnels en matériaux végétaux assez bruts (berimbau, flûte de pan, bâton
de pluie, sanza…), que les gens étaient invités à manipuler ; et en même temps on proposait un atelier de
fabrication de maracas en noix et de sifflet en carotte. Le public cible était
les enfants de 0-3 ans le matin et ceux de 3-6 ans l’après midi, accompagné de
leurs parents bien entendu. Et en effet ça a vraiment bien marché : ces
instruments insolites, fascinants et souvent inconnus ont mis tout le monde à
égalité : grands, petits, bébés et grands parents, ados qui passaient par
là, trentenaires avec leurs bébés… et tout le monde jouait ensemble, et tout le
monde avait le sourire…journée idyllique !
J’ai l’impression que devant
ces instrument hyper simples et venus du fond des âges, chacun a retrouvé sans
même s’en rendre compte un rythme, une vibration, une attirance profonde et
mystérieusement commune à chacun d’entre nous. J’ai regardé les gens devant
l’expo, je les ai vu prendre les instruments, et je voyais parfois dans leur
regard qu’au moment où ils se saisissent de l’instrument, tout le reste du
monde disparaît d’un coup : on dirait que c’est l’instrument qui s’est saisi de la personne,
et non l’inverse, et que seul l’instrument pourra décider de restituer la personne
au monde alentour, quand il sera satisfait …
Oui, je sais, c’est un peu
bizarre, et moi même je ne sais rien de plus que ce que j’ai vu. Y-a-t-il des
musiciens parmi vous, ou des ethno-musicologues, ou des gens comme moi qui ont
déjà été témoins de ce phénomène troublant ? Une théorie, une explication ?
J’avais déjà été témoin de ça,
une nuit, sur les bord de la Seine, à Paris. Assise avec un groupe de gens que
je venais de rencontrer. Des gens passent, discutent, s’assoient. Un jeune
arrive, roulant des mécaniques. S’assoit. Saisi une sanza, qui trainait par là
(« piano à pouces » africain). Il est resté des heures, les yeux
fixés sur (dans ?) l’instrument, le caressant, le faisant chanter, il nous
avait complètement oublié. L’instrument l’a relaché lorsque le jour se levait. Alors
le jeune s’est levé, a regardé autour de lui, sans trop comprendre, et il est
parti.
Pour en venir au jardin, dont
je vous ai déjà parlé je crois, mes deux petites buttes expérimentales de
permaculture se portent plutôt bien, mis à part les tomates grignotées sévèrement
par le mildiou, et les aubergines qui ont dù prendre environ 1 cm par mois
depuis leur plantation il y a deux mois. Ah oui, et les poivrons /piment qui
disparaissent régulièrement sous les crocs acérés et baveux des gastéropodes
affamés ( quoique avec tout ce qu’ils mangent ils ne doivent plus avoir si
faim…). Par contre la coriandre est magnifique et résiste à tout (sauf un plant
qui a mystérieusement flétri, et qui après vérification s’est avéré attaqué par
la racine par je ne sais quel organisme cryptogame ou animal…).
--Note : vous pouvez voir les photos du jardin dans l'album "Le jardin de Charlotte"
***
Voilà, quelques jours ont passé
entre ce dernier paragraphe et le reprise de l’écriture. Entre temps les
enfants ont défilé, toujours sympas, vivants ; le jardin a continué de
pousser. Les tomates ont l’air de reprendre un peu de poil de la bête. Elles ne
sont pas tirées d’affaire, mais j’ai bon espoir. Je les soigne à l’infusion de
feuilles de capucine, selon un conseil trouvé dans le fameux livre « Purin
d’ortie etc ». Mes aubergines font toujours pitié, mais que faire ?
J’attend avec impatience que la coriandre graine et sèche, ça dégagera de la
place pour d’autres choses. Parce que mine de rien ça monte haut ces belles
fleurs blanches !
J’habite à présent dans un
bâtiment du lycée, sur mon lieu de travail, et l’internat qui n’est pas très
loin est loué pendant l’été à divers groupes de gens. En l’occurrence, ces deux
dernières semaines, à des groupes de musiciens du monde entier, venus à Saintes
pour un festival de folklore mondial (je déteste le mot « folklore »).
Un soir, je me promenai sur le site, et j’ai vu une imposante jeune femme
tamponner d’un kleenex ses yeux, pendant que ses épaules tressautaient. Elle
pleurait. Je suis allée la voir, lui passer la main dans le dos, lui adresser
quelques mots en espagnol (sa veste arborait « Venezuela »). Son pays
lui manquait, si j’ai bien compris. Elle me demande ce que je fais ici. Je lui
explique comme je peux en quoi consiste mon métier, et là, grand sourire et
babillement en espagnol (je ne comprends pas tout, pour ne pas dire pas grand
chose), quand tout à coup je suis parcourue de frissons : elle est en
train de me parler de permaculture !
Ici, dans un lycée horticole,
aucune des personnes à qui j’en ai parlé n’avait entendu parlé de cela, et je
me rends compte qu’en dehors de nos frontières cette approche est beaucoup plus
connue. C’est un vrai soulagement pour moi, car je dois dire que, comme à la
plupart d’entre vous je pense, l’enthousiasme d’Ino a été communicatif . Ce
concept m’a vraiment bien parlé. Cette semaine d’ailleurs je brûle de voir le
sol sécher un peu après la pluie des dernières semaines, afin de pouvoir
confectionner une nouvelle butte. (Se sera je crois Cucurbitacées, haricots,
poireaux, salades. Qui viendra goûter ma soupe quand le froid sera venu ? ! !).
Cette rencontre expresse
vénézuélienne m’a vraiment fait prendre conscience … de ma profonde ignorance,
notamment de ce qui se passe en dehors
de nos frontières. Comme je l’ai dit à Paola, que j’ai eu la chance de revoir
par hasard à Montélimar fin Juin, et avec qui nous essayons de garder le
contact ; j’ai fait le vœux ce jour là de me botter les fesses d’ici
quelques années et de partir courir un peu le monde pour voir ce qui s’y passe.
Elle (Paola) m’a d’ailleurs invitée à venir visiter l’Amérique du Sud avec elle
d’ici 2 ans… Nous vous tiendrons au courant.
J’espère que vos cheminements
vous apportent, et que ça va comme vous voulez. Que l’été vous transmette sa
force et sa chaleur. Stockons là bien dans nos mémoires car nous en aurons
besoin cet hiver !
Je vous embrasse et vous dit à
bientôt peut-être.
Charlotte.